LA CHANSON DE CRAONNE
La Chanson de Craonne (du nom du village de Craonne) est une chanson contestataire, chantée par des soldats français durant la Première Guerre mondiale, entre 1915 et 1917. Elle est interdite par le commandement militaire qui la censure en raison de ses paroles antimilitaristes (« on s'en va là-bas en baissant la tête », « nos pauvr' remplaçants vont chercher leurs tombes »), défaitistes (« c'est bien fini, on en a assez, personne ne veut plus marcher ») et subversives incitant à la mutinerie (« c'est fini, nous, les troufions, on va se mettre en grève ») alors qu'une guerre est en train de se livrer sur le territoire national.
Cette chanson politiquement engagée (à l'extrême-gauche) a des visées anticapitalistes quand elle fustige « Les gros », « ceux qu'ont le pognon » et « les biens de ces messieurs là ». Elle est contemporaine de la Révolution Bolchevique de 1917 qui a entraîné, en France, la mutinerie des soldats communistes russes à La Courtine et, sur le front de l'Est, la débandade et le retrait des troupes russes (alors alliées à la France).
L'origine de la chanson
Cette chanson anonyme a sûrement plusieurs auteurs. Elle est apprise par cœur et se diffuse oralement de manière clandestine. Selon une légende qu'aucune source n'atteste, le commandement militaire aurait promis un million de francs or et la démobilisation à quiconque dénoncerait l'auteur. La chanson a continuellement évolué au cours de la guerre en fonction des lieux principaux de combat. Elle apparaît sous le nom de La Chanson de Lorette, avec pour sous-titre « complainte de la passivité triste des combattants » évoquant la bataille de Notre-Dame de Lorette à Ablain-Saint-Nazaire, entre septembre 1914 et septembre 1915. Ensuite, la chanson est transformée pour évoquer le plateau de Champagne au cours de l'automne 1915. En 1916, elle devient une chanson sur Verdun, le refrain devient :
Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu à toutes les femmes
C'est bien fini, c'est pour toujours
De cette guerre infâme
C'est à Verdun, au fort de Vaux
Qu'on a risqué sa peau [...]
Source: Wikipedia
Quand au bout d´huit jours, le r´pos terminé,
On va r´prendre les tranchées, Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile.
Mais c´est bien fini, on en a assez,
Personn´ ne veut plus marcher,
Et le coeur bien gros, comm´ dans un sanglot
On dit adieu aux civ´lots.
Même sans tambour, même sans trompette,
On s´en va là haut en baissant la tête.
(Refrain)
Adieu la vie, adieu l´amour,
Adieu toutes les femmes.
C´est bien fini, c´est pour toujours,
De cette guerre infâme.
C´est à Craonne, sur le plateau,
Qu´on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C´est nous les sacrifiés!
Huit jours de tranchées, huit jours de souffrance,
Pourtant on a l´espérance
Que ce soir viendra la r´lève
Que nous attendons sans trêve.
Soudain, dans la nuit et dans le silence,
On voit quelqu´un qui s´avance,
C´est un officier de chasseurs à pied,
Qui vient pour nous remplacer.
Doucement dans l´ombre, sous la pluie qui tombe
Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes.
(Refrain)
Adieu la vie, adieu l´amour,
Adieu toutes les femmes.
C´est bien fini, c´est pour toujours,
De cette guerre infâme. C´est à Craonne, sur le plateau,
Qu´on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C´est nous les sacrifiés!
C´est malheureux d´voir sur les grands boul´vards
Tous ces gros qui font leur foire;
Si pour eux la vie est rose,
Pour nous c´est pas la mêm´ chose.
Au lieu de s´cacher, tous ces embusqués,
F´raient mieux d´monter aux tranchées
Pour défendr´ leurs biens, car nous n´avons rien,
Nous autr´s, les pauvr´s purotins.
Tous les camarades sont enterrés là,
Pour défendr´ les biens de ces messieurs-là.
(Refrain)
Adieu la vie, adieu l´amour,
Adieu toutes les femmes.
C´est bien fini, c´est pour toujours,
De cette guerre infâme.
C´est à Craonne, sur le plateau,
Qu´on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C´est nous les sacrifiés!
Ceux qu´ont l´pognon, ceux-là r´viendront,
Car c´est pour eux qu´on crève.
Mais c´est fini, car les trouffions
Vont tous se mettre en grève.
Ce s´ra votre tour, messieurs les gros,
De monter sur l´plateau,
Car si vous voulez la guerre,
Payez-la de votre peau!