Au Bois Le Prêtre 1915







Au bois-le-Prêtre ( 1916) Paroles Lucien Boyer, Musique Aristide Bruant, harmonisation Jean Férole
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On est terré comme un renard,
On est tiré comme un canard,
Si l’on sort, gare au traquenard,
Où l’on s’empêtre...
Dès que l’on quitte son bourbier
On reçoit un lingot d’acier
Car l’on est chasseur et gibier,
Au bois le Prêtre.

Tous les arbres y sont hachés,
Et des Bavarois desséchés
Là-haut sont encore accrochés
Sur un vieux hêtre,
Il y sont pour longtemps, dit-on,
Car même le vautour glouton
Vous a le dégoût du Teuton,
Au bois le Prêtre.

Là-bas, le fauve, c’est le pou...
Ce que l’on se gratte, c’est fou !
D’abord, on lutte avec la poudre
De pyrèthre,
Puis aux " totos " on s’aguerrit
Et l’on conclut avec esprit :
Plus on a de poux, plus on rit
Au bois le Prêtre.

On est sale, on est dégoûtant,
On a tout de l’orang-outang,
On rit de ressembler pourtant
A cet ancêtre !
Dans la boue on vit et l’on dort,
Oui, mais se plaindre, on aurait tort
La boue, elle a des reflets d’or
Au bois le Prêtre.

Si, du canon bravant l’écho,
Le soleil y risque un bécot,
On peut voir le coquelicot
Partout renaître...
Car, dans un geste de semeur,
Dieu, pour chaque Poilu qui meurt,
Jette des légions d’honneur
Au bois le Prêtre !

Après la guerre, nous irons
Et nous nous agenouillerons
Sur chaque croix, nous écrirons
En grosses lettres :
" Ci-gît un gars plein d’avenir,
Qui, sans un mot, sans un soupir,
Pour la France est tombé martyr
Au bois le Prêtre.